(Turquie, été 1989)
Les atouts d'Izmir :
une frénésie somnolente, une turbulente torpeur.
Qui débarque à Izmir, venant d'un Occident retranché dans son ignorante supériorité, doit d'abord réviser ses idées préconçues : les formalités de douane et de police ne s'accomplissent pas au son des derboukas, entre les tournoiements de derviches barbus; point de sultans suivis d'innombrables eunuques, protégeant férocement un harem de houris invisibles aux yeux langoureux; les fonctionnaires de l'Enregistrement ne maudissent pas lettre à lettre le passeport de l'arrivant; la piste d'atterrissage n'est pas envahie de hordes de janissaires précédés de marmites fumantes; devant l'aéroport, on ne voit plus guère de mameluks(1) tranchant la tête des chauffeurs de taxi en stationnement interdit; et cependant, cinq fois par jour, l'appel du muezzin flotte sur les toits de la ville.
Ancienne Smyrne, capitale du trafic (et) des raisins, Izmir comptait autrefois davantage de Juifs que de Musulmans, et davantage de Grecs que de Juifs (mais moins d'Arméniens). Ce cosmopolitisme a disparu pour faire place à une certaine xénophobie : témoins les déboires de deux voyageurs français, MM. Denisf et Denisl, récemment débarqués en fustanelle et bonnet à pompons, croyant passer inaperçus, par suite d'une méprise dans l'interprétation d'un article de l'Encyclopaedia Universalis.
Leurs mollets poilus paraissant indécents aux yeux de l'officier sanitaire, ils durent immédiatement s'affubler de serwals(2) sous leurs fustanelles, et dissimuler leur chevelure sous des foulards (par-dessus lesquels ils conservèrent néanmoins leurs bonnets à pompons); bien heureux d'avoir échappé à la traditionnelle bastonnade sur la plante des pieds.
Leur accoutrement ne passa pas pour autant inaperçu des rabattörs du bazar, qui les attirèrent dans des boutiques de costumes de cérémonie; et ils durent porter, par-dessus leurs bonnets à pompons, de rutilants képis, ainsi que des vestes de circoncision chamarrées; bien heureux de n'être pas circoncis (ou recirconcis) par la même occasion.
Cette élégance tout orientale les mena directement à l'Emir Palas Otel, dont l'enseigne, fièrement barrée d'un néon hors d'usage, leur tendait les bras. Échaudés par une longue expérience, ils hésitaient à en franchir le seuil, crainte que le néon ne leur tombât sur la tête. Mais deux portörs, remarquant leur hésitation, saisirent leurs sacs à dos, qu'ils se mirent en devoir - sans se soucier d'en retirer les propriétaires - d'apporter au haut de l'escalier escarpé qui conduisait à la resepsiyon. Tout en gravissant à reculons l'escalier, et en se félicitant de n'avoir point fait chuter le néon, les Denisfl cherchaient à s'extraire de leurs courroies; ils n'y parvinrent qu'à la dernière marche, ce qui leur permit de redescendre l'escalier plus vite qu'ils ne l'avaient monté, et d'aller s'emboutir sur le chambranle de la porte; et l'enseigne de l'hôtel leur dégringola dessus. Le néon tenait encore; mais, en se relevant, Denisf eut un geste malheureux, et le tube alla s'écraser sur les arpiyons de Denisl.
Ce dernier, un adepte de la vérité du discours relationnel, voulut s'en plaindre à son acolyte, mais n'eut droit, en guise d'excuses, qu'à un discours en trois points sur les dernières découvertes en matière de gravitasiyon.
Le principal profitör de la situasiyon fut un vendör local, qui, pour éviter que cette péripétie ne se renouvelât, les équipa de chaussures de ski dont la couleur orangée se mariait merveilleusement avec le vert de leurs capes de circoncision. - «Pourquoi des chaussures de ski ? demanda Denisl. - Et pourquoi pas ?» répondit Denisf.
Sur ces mots, les Denisfl regagnèrent leur hôtel, où ils furent sommés d'abandonner leurs passeports au sous-direktör (un gentleman à moustache argentée, qui exploitait également une Paramedikal Ticaret spécialisée dans la prise de tensiyon artérielle des consommateurs de chich kebab). Celui-ci comprit immédiatement, à la similitude de leurs noms, qu'ils étaient frères jumeaux, et leur fournit donc une chambre familiale à un seul lit. Ils durent aussi payer le supplément douche, où on les conduisit aussitôt, en leur intimant de retourner la clé au bout de cinq minutes (notons que Denisf, par précaution, prit sa douche sans retirer son sac à dos). Denisl exigea que Denisf dormît tout habillé (ce qui détrempa fortement les draps) et, à tout hasard, en fit autant (mais sur le ventre, car il avait gardé son sac à dos).
Notre test de l'été :
êtes-vous börek ?
Pour le client du Club'Med, Altinkum est la plage must. Voire. Les T-shirts tendancieux n'y manquent pas. Les minettes anatoliennes non plus. Le barman du Piyer Loti, qui se vante de pouvoir en soulever deux à la fois, en sait quelque chose : c'est lui qui prépare chaque année la fondue, spécialité de cet établissement(3).
Ambiance oblige, il n'en sert qu'une par soirée. Entrons-y comme par hasard : une estrade est dressée au milieu de la piste de danse. Sous les regards envieux des exclus, un couple, forcément disparate.
Elle, professeur d'espagnol. Les cheveux frisés, parlant beaucoup, agitant les mains, et couvrant du même coup son vis-à-vis de croûtons imbibés de vin blanc. Lui, distingué, jeune encore, en smoking immaculé, enroulant impeccablement la longue fourchette dans le caquelon. Il est Anglais. Plus qu'Anglais : diplomate.
Elle, entreprend de l'asperger, en se plaignant aigrement du machisme des chauffeurs de camion locaux. Lui, déplore le malentendu de Gallipolli.
Elle, repêchant des morceaux de pain noyés qu'elle dépose dans le giron de son compagnon, admire les déplacements des serveurs dans l'espace. Lui, commente l'incidence du pacte d'adhésion de la Turquie à la C.E.E.
Elle, s'attachant à lui par un réseau de longs fils de fromage, commence à jongler avec les oeufs mayonnaise qui traditionnellement accompagnent la fondue du Piyer Loti. Lui, évitant élégamment un oeuf dur (qui explose dans son assiette), cite du Woolworth.
Elle, se relaxant totalement, s'allonge sur la table, les pieds dans le yaourt, la tête dans le caviar d'aubergines. Lui, sort sa carte de crédit : c'est la seule chose propre qui lui reste.
Renseignements généraux.
Chemins de fer.
D'Istanbul à Ankara.
D'Istanbul à Izmir, voir Paul contre Interpol(4).
314,16 km : Izmir.
Au départ d'Izmir, joli aperçu sur les **grands ensembles
modernes, dans un décor impressionnant.
317 km : Müdürlügü.
Buffet. On ne visite pas.
318 km : Ticaret.
Börek. Le voyageur prudent aura cependant intérêt à ne pas descendre
de voiture, le temps d'arrêt étant imprévisible.
319 km : ***gare de Gar.
Chef-d'oeuvre de l'architecture ferroviaire, cette gare n'est pas
desservie par les trains express, sauf circonstance exceptionnelle.
Du 320ème au 333ème km, soixante-sept localités sont desservies par les trains express. Nous ne saurions trop conseiller au voyageur pressé d'éviter les trains omnibus(5), qui, de façon réglementaire, s'arrêtent suffisamment longtemps pour permettre au voyageur se rendant d'une gare à la suivante d'effectuer son trajet en montant en queue du train et en descendant en tête, et vice versa.
C'est un tel train qu'avaient emprunté les Denisfl. Pour ne pas le manquer, ils s'étaient levés dès l'appel à la première prière, et avaient tourné en rond dans leur chambre d'hôtel, le sac sur le dos, mais tenant leurs chaussures de ski à la main pour ne pas faire trop de bruit.
À la tombée de la nuit, ils avaient pu embarquer dans un yolçu(6) où leur accoutrement ne les empêchait pas de se faire bousculer par de frêles paysannes anatoliennes et des bambins aux grands yeux timides. Aussi le chef konduktör, les prenant en pitié, affréta-t-il spécialement un wagon-restaurant où il les convia à aller se sustenter. Dès qu'ils y furent arrivés, une escouade de parfumörs, armés de bonbonnes de coulörs diverses, les vaporisèrent de parfums aussi variés que désagréables, tandis que leur chef les arrosait d'eau de Cologne à l'aide d'une lance à incendie. Puis ils eurent droit à l'un de ces excellents repas que seuls savent préparer les cuisiniers des wagons-restaurants turcs, qui commença par une tasse de soupe fade, suivie d'une tranche de viande insipide, et dont le bouquet final fut une tranche de pastèque desséchée.
En réintégrant leur compartiment, ils eurent la surprise de constater que leurs couchettes étaient envahies par une horde de bambins dont les plus grands se livraient à des déprédations diverses, tandis que les plus jeunes étaient manifestement affligés d'indispositions variées.
Devant la toilette murale, une jeune femme, dont un costume anatolien ne réussissait pas à dissimuler les formes généreuses, souriait aux Denisfl : «Je suis Kapina, se présenta-t-elle, et je voyage avec des enfants de divers lits; le petit brun qui jette vos affaires par la fenêtre, c'est Baba Tistou; celle qui est en train de piller vos réserves de chocolat c'est Meryem, ma nièce. Je me suis servie de quelques pages de l'Encyclopaedia Universalis que vous transportez avec tant d'à-propos, poursuivit-elle avec un coup d'oeil à Denisf, pour nettoyer le petit Sioma, qui est un peu dérangé - et que finalement j'ai installé dans votre sac à dos, ajouta-t-elle avec un sourire à l'adresse de Denisl. J'ai couché Tao et Gabriel dans vos duvets : ne craignez rien, ils sont presque propres. Celui qui vient de voler vos passeports c'est Pierrot; il est un peu difficile et il faut du doigté pour le manipuler; Charlot, lui, est une bonne pâte, mais il cherche à imiter son cousin : c'est seulement pour ça qu'is vous a subtilisé votre argent.
Mais tous ces gosses ont très bon coeur, vous savez, et en vous attendant ils ont confectionné ces deux superbes colliers de nouilles : mettez-les, cela leur fera tellement plaisir...»
Les Denisfl enfilèrent prestement leurs colliers de nouilles par-dessus leurs capes de circoncision, et immédiatement les marmots reconnaissants s'accrochèrent à eux. C'est ainsi qu'ils passèrent les quarante-huit heures que dura le voyage, et qu'ils débarquèrent à la gare d'Ankara.
Un étrange spectacle les y attendait.
Sur quelques boucles logiques.
«Où se trouve le nord ? demanda Denisl, je l'ai perdu.» Denisf répondit par un long discours sur la précession des équinoxes, et laissa tomber l'un des marmots qu'il portait (mais ce n'était pas Sioma). Kapina Marmik se précipita pour ramasser le bébé, qu'elle posa négligemment sur l'épaule d'un gentleman impeccable qui passait.
Le marmot se mit aussitôt à vomir sur la tête du gentleman, qui n'en parut pas autrement affecté, et poursuivit d'un air détaché ses réflexions à haute voix sur la déclaration Balfour. Sa compagne essayait de marcher sur les mains, mais s'aidait à chaque pas d'un ou deux pieds suivant les circonstances, en sifflant (faux) une mélodie de Purcell. Mais elle s'immobilisa soudain, et, apostrophant le gentleman : «Oh ! s'écria-t-elle, mon sosie !» La ressemblance était frappante, en effet : Kapina était aussi blonde que celle-là était brune, et aussi bien foutue que l'autre l'était mal.
Tous les personnages présents ne purent que s'exclamer, qui en français, qui en anglais, qui en turc, qui en kurde, qui en arménien, qui en allemand, qui en ladino, et même un en grec : «Oh, comme elles se ressemblent !» Seuls les Denisfl, croyant qu'on parlait d'eux, se renfrognèrent. Le diplomate, pour réchauffer l'atmosphère, compara alors avec aisance les principales dispositions du traité de Westphalie et de la convention de Varsovie.
[CM 43] Chen Mi-Chel : Sur la résolution probabiliste de quelques équations différentielles à coefficients aléatoires, Éditions de Minuit, 1943.
[EJM 85] Sr Dr Escamillo de Model Arnoldo Y Niva, Juan Miguel y Boaçón : La côte égéenne est-elle un objet fractal ?, Pif-Gadget num. 10893, pp. 91-97.
[SB] Simone de Beauvoir : Mémoires d'une jeune fille rangée, Gallimard.
[MP 62] Jacques Monod, Guy Périllat : Les chalets et la nécessité, Springer-Verlag, 1962.
[NO 68] Le Nouvel Observateur, 1968.
[PCI] : Paul contre Interpol, des mêmes auteurs (à paraître).
Fermer une porte,
c'est quelquefois ouvrir un coeur
En 19**, Maziköy était une bourgade de quatre cent trente-deux habitants. Quatre cent trente-deux : trois à la puissance trois, multiplié par deux à la puissance quatre. Trois plus trois égalent deux plus quatre. Le nombre est un hochet entre les mains du Créateur. Rome aussi eut quatre cent trente-deux habitants.
Rome a son Colisée : Maziköy n'a pas de Colisée. Rome a ses aqueducs : Maziköy n'a pas d'aqueducs. Rome a son Forum : Maziköy n'a pas de Forum. Rome a son Corso Vittorio Emmanuele II : Maziköy n'a pas de Corso Vittorio Emmanuele II(7). Rome a son Capitole : Maziköy n'a pas de Capitole. Rome a sa Roche Tarpéienne : Maziköy, non. Pourtant, Maziköy s'est élevée aussi haut que Rome. Où cela ? Sous terre.
Qu'on imagine les dessous de Paris, et que cela soit Paris. Effroyable substitution de l'immeuble à l'égout. Monstrueuse érection vers le bas d'une tour de Babel. Une ville, mais l'envers d'une ville, produit des cauchemars d'un Bouygues antipodiste.
On a comparé Maziköy à une meule géante de gruyère. C'est accoupler le barbarisme au contresens. Le gruyère n'a pas de trous. Les trous du gruyère ne communiquent pas.
Prenez une choucroute garnie. Recouvrez-la de plomb fondu. Mangez la choucroute : vous avez Maziköy - en miniature. Là où il y avait des saucisses, des hommes ont vécu. Là où il y avait du lard, les hommes ont dormi. Là où il y avait des côtelettes, des hommes ont prié. Et ils communiquaient par la choucroute.
Aujourd'hui, les hommes ne communiquent plus par la choucroute, ils ne prient plus dans les côtelettes, ils ne dorment plus dans le lard, ils ne vivent plus dans les saucisses : ils guident. Et qui guident-ils ?
Ce voyageur solitaire qui ne se déplace plus qu'en groupe : en groupe, disons en horde, voire en meute; qui ne voit le paysage qu'à travers la vitre fumée de l'autocar, qui ne sent des parfums de l'Orient que les Kleenex imbibés d'eau de Cologne distribués dans l'avion, qui ne touche au but que pour repartir aussitôt, qui ne goûte de la cuisine locale que ces menus d'hôtel si déprimants qu'ils constituent des actes de mortification, qui n'entend le murmure des siècles que troublé par les aboiements des guides, qui ne comprend Dieu qu'à travers son objectif photographique : ce voyageur, c'est le touriste.
Cinq de ces touristes, accompagnés d'enfants en bas âge, suivaient leur guide. Lisez : leurs guides. Ils en avaient deux. L'un proclamait, en turc, qu'il était le guide officiel. L'autre expliquait, en allemand, que les touristes n'entendaient pas le turc. Ils n'entendaient pas non plus l'allemand.
L'une de ces touristes, adossée contre un mur, tentait de jongler avec deux abricots, tout en décochant des sourires enjôleurs à l'un des guides, et des oeillades assassines à l'autre. Deux des touristes disputaient du sens exact de «stehendu» dans l'expression «faire stehendu» : le plus grand, nonchalamment crispé, assis en lotus sur les talons; l'autre, tournant précipitamment autour du premier, et se cognant la tête à chaque tour à la même saillie. Un quatrième touriste, en smoking blanc, récitait la dépêche d'Ems. Les bambins grouillaient.
Interrompant dialogues et monologue, la dernière touriste s'engouffra dans un couloir avec toute la marmaille. Quand l'homme digresse, la femme progresse. Le représentant de Sa Gracieuse Majesté (car c'était lui) la suivit distraitement, fredonnant entre ses dents l'ultimatum austro-hongrois à la Serbie. La jongleuse brune essaya de s'accrocher aux deux guides, qui l'esquivèrent. Les Denisfl (car c'était eux) suivirent le mouvement en continuant d'argumenter : «Faire stehendu, c'est fermer la porte», décida Denisl, et il se mit en devoir de la faire rouler. Mais, alors qu'elle était presque fermée, Denisf décréta que «faire stehendu» signifiait éteindre la lumière, et passa vivement la main à travers le chambranle pour actionner le disjoncteur principal. Les ténèbres tombèrent sur les hurlements du malheureux, dont la dernière phalange était restée coincée.
L'obscurité dans un souterrain : c'est le bandeau sur les yeux de l'aveugle, c'est le loup vénitien sur la face du Maure(8); ce pléonasme vous écrase, et vous ne voyez pas le rictus du Destin.
Mais cette nuit dans la nuit, c'est aussi le flambeau qui éclaire les cagibis de l'âme, les alcôves du courage, les tiroirs du dévouement.
Au milieu des cris de souffrance de Denisf, des insultes de Denisl, des piaillements de la marmaille, des jurons polyglottes des guides, du mutisme impuissant et terrifié de la jongleuse et du silence efficace et courageux de Kapina, le diplomate dégrafa le bouton de manchette du poignet droit de sa chemise, qu'il retroussa impeccablement. Il décapuchonna son stylographe, dont il utilisa la pointe de platine, qui luisait dans les ténèbres, pour percer un passage dans la muraille de tuf tendre, tout en chantant vaillamment la liste des principales obligations réciproques imposées aux deux signataires du traité de 1923 entre le sultanat d'Oman et le Royaume-Uni.
«Je suis venu, j'ai vu, j'ai conquéri», déclara-t-il dans son français irréprochable.
(1) D'autant que les mameluks étaient égyptiens (NDLR).
(2) Pantalons bouffants des paysannes anatoliennes (NDA).
(3) «Le Piyer Loti. Café de Paris. Restaurant. Bar. Fondue.» (communiqué)
(4) Inédit, des mêmes auteurs (NDE).
(5) Yolçu(5 bis) (note de l'un des Auteurs).
(6) Voir note précédente (note du même Auteur).
(7) Mais Maziköy a un Atatürk Caddesi : Rome n'a pas d'Atatürk Caddesi.